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Quand Airbus lancera-t-elle l’A220neo*?

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Neuf ans après l’entrée en service de l’A220, les problèmes de fiabilité des moteurs GTF de Pratt & Whitney continuent de nuire au rendement et à la disponibilité des appareils. Dans le présent texte, je fais le point sur la situation et évalue les options d’Airbus pour le programme A220.

Des avions qui ne volent pas

En juillet dernier, la revue Flight Global rapportait que 75 des 440 A220 livrés étaient cloués au sol en raison de l’usure prématurée des moteurs. En septembre, ce nombre serait de 80, ce qui veut dire que le problème ne se résorbe pas. Remarquez que pour l’A320neo, A321neo ainsi que les versions LR et XLR, il y aurait au moins 592 dans la même situation.

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Les clients d’Airbus doivent donc jongler avec une partie de leur flotte qui est inutilisable. Pour les grandes compagnies aériennes, cela représente un problème de plus, mais elles arrivent à gérer. Mais pour les petits exploitants, la situation est tout autre. C’est le cas pour Air Austral qui ne possède que trois A220 et qui ne peut pas se permettre d’en garder un ou deux au sol, ce qui s’est produit à l’été 2024. Face à cette situation, la compagnie a décidé de se départir de ses A220. Egypt Air avait pris la même décision en 2024 pour ses 12 A220-300.

La position d’Airbus

Lorsque Bombardier a développé le C Series en 2008, elle avait donné l’exclusivité de la motorisation à Pratt & Whitney. Depuis qu’Airbus a pris le contrôle du programme en juillet 2018, elle s’est souvent fait demander si elle comptait opter pour une deuxième motorisation et la réponse était toujours vague. Mais en 2024, le président d’Airbus Canada, Benoît Schultz, a pointé du doigt le GTF de Prat & Whitney pour les retards dans les livraisons. Ce changement de ton laisse donc entrevoir une certaine impatience face aux problèmes persistants sur les moteurs et c’est compréhensible.

En aéronautique comme dans la plupart des domaines d’activité, vous avez beau faire des pieds et des mains, proposer des solutions ou de nouveaux produits, en fin de compte c’est toujours le client qui prend la décision finale. Tant que ces derniers achetaient et prenaient livraison des avions commandés, Airbus pouvait se montrer patiente envers le motoriste. Mais les retraits successifs par Egypt Air et Air Austral viennent jeter un doute. Pour le moment, les dommages sont limités puisque ce sont de petites compagnies aériennes qui tournent le dos à l’A220. Mais si de gros clients tels qu’Air Canada, Air France, Breeze ou encore Delta menacent de retirer l’A220, Airbus sera forcé d’agir. Je souligne ici que depuis deux ans, les commandes d’A220 se font rares.

L’option Rolls-Royce

Le motoriste Rolls-Royce planche sur un projet de moteur qui lui permettrait de faire un retour dans le lucratif marché avions monocouloirs. Ce programme de moteur porte la désignation de UNIFIED (Ultra Novel and Innovative Fully Integrated Engine). Ce serait une version réduite de son moteur UltraFan pour les longs courriers actuellement en développement. Le problème, c’est que ce nouveau moteur ne sera pas disponible avant 2035. Et de plus, c’est un autre moteur dont la durabilité n’est pas encore prouvée. C’est une option, mais pas à court terme.

L’option du LEAP

Bien que le moteur LEAP du consortium CFM ait connu lui aussi des difficultés au cours de ses premières années en service, sa fiabilité augmente nettement plus rapidement que celle de son compétiteur. Ce qui est intéressant avec le LEAP, c’est que le fabricant avait commencé à plancher dessus au début des années 2000. Or, c’est à cette période que Bombardier travaillait sur le C Series, d’ailleurs, en 2004, l’avionneur et le motoriste avaient eu des discussions à ce sujet. À cette époque, le motoriste parlait d’une gamme dont la puissance variait entre 23 000 livres et 35 000 livres de poussée. De son côté, Bombardier voulait un moteur avec une poussée de 22 000 livres à 25 000 livres. Notez que tous les clients du C Series puis de l’A220 ont opté pour la version la plus puissante disponible soit le PW1524G offrant 24 000 livres de poussée.

À la suite des pourparlers, CFM a sans doute jugé que le marché pour cette gamme de puissance était trop petit et aurait donc tourné le dos à Bombardier. Mais l’arrivée d’Airbus dans le décor et la possibilité d’une version allongée de l’A220 pourrait sans doute motiver CFM à s’y intéresser de nouveau. En effet, l’A220-500 a un potentiel de vente beaucoup plus élevé que les versions 100 et 300. Pour Airbus, l’A220-500, c’est une occasion de rouvrir la compétition entre les fournisseurs de moteur. Voilà une option qui me paraît fort intéressante.

La réponse

Avant de répondre à la question dans le titre, je dois vous faire un aveu, j’ai utilisé l’acronyme neo dans le but d’attirer votre attention, et j’espère que vous ne m’en voudrez pas trop. En effet, ajouter le LEAP sur l’A220 ne correspond pas à la désignation neo puisqu’il s’agit d’une gamme de moteurs existants. 😉

L’annonce du LEAP sur l’A220 devrait donc se faire à peu près en même temps que celle de l’A220-500. Je souligne également que les problèmes du PW1524G ralentissent la production de l’A220 et par conséquent le moment où le programme deviendra rentable. L’arrivée de LEAP permettrait non seulement de régler la fiabilité des moteurs, mais aurait comme autre conséquence d’en accélérer la rentabilité.

Pour ma part, je ne suis pas vraiment inquiet pour le futur de l’A220, parce que si j’avais à écrire un livre sur l’histoire de cet avion, le titre serait quelque chose comme : « C Series-A220, l’art de naviguer face à des vents contraires.

*Pour ceux et celles qui se le demandent, l’acronyme neo signifie ¨New Engine Option. ¨

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One thought on “Quand Airbus lancera-t-elle l’A220neo*?

  • Normand Hamel

    Pour ma part je trouve très approprié, même si ce n’est pas officiel, de désigner « neo » une éventuelle nouvelle version du A220 équipée du moteur LEAP. En ce qui concerne ce dernier je voudrais cependant apporter quelques précisions.

    Lorsque Bombardier explorait la possibilité d’offrir un moteur CFM International pour la version initiale du CSeries qu’elle proposait en 2004, il s’agissait alors du CFM56 et non pas du LEAP qui lui n’existait pas encore. L’ironie veut que la version finale du CSeries proposée par Bombardier en 2008 ait lieu en même temps et au même endroit que le LEAP. En effet le programme LEAP de CFM International a été officiellement lancé à Farnborough le 13 juillet 2008, tandis que le CSeries, tel que nous le connaissons aujourd’hui sous la désignation A220 d’Airbus, a lui été lancé officiellement le lendemain, soit le 14 juillet, au même Farnborough Airshow, mais offert alors uniquement avec le moteur GTF de P&W. Donc, en 2008 le LEAP n’était pas lancé pour équiper le CSeries mais plutôt le 737 de Boeing.

    Cela dit, il n’est pas trop tard pour offrir le LEAP sur le(s) modèle(s) existant(s) du A220, particulièrement le A220-300, ainsi que le très attendu A220-500. Cependant si le LEAP est plus fiable il a par contre été conçu pour de plus gros appareils et Airbus aurait donc besoin de la version située à l’extrémité inférieure de la gamme. Mais comme il s’agit essentiellement du même moteur dans toutes ses variantes, le rapport poids/puissance se trouve quelque peu défavorisé pour les versions les moins puissantes dont Airbus aurait besoin.

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