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Boeing a-t-elle fait du dumping au Canada?

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Le Boeing B737 MAX est une version remotorisée du B737 dont la conception remonte aux années soixante. Si le B737 MAX est un succès commercial avec plus de 3 800 exemplaires vendus à ce jour, sa plus petite version le B737-700 MAX est un échec avec seulement 50 exemplaires vendus.

 

L’explication des faibles ventes du B737-700 MAX est bien simple: comme ce n’est qu’une version raccourcie du B-737-800MAX, ses coûts d’opération sont pratiquement les mêmes que ceux de son grand frère malgré le fait qu’il transporte moins de passagers. Ses performances économiques sont tellement mauvaises que seulement trois compagnies aériennes ont commandé des B737-700 MAX et ce sont l’américaine Southwest Airlines ainsi que les deux compagnies canadiennes WestJet et Jetlines.

 

Les 30 B737-700MAX de Southwest Airlines faisaient partie d’une commande de 200 B737 MAX placée en décembre 2011. La compagnie Southwest Airlines n’opère que des B737 dont elle est le plus gros opérateur au monde avec plus de 740 appareils en service. Puisque cette compagnie aérienne n’exploite que des B737 en grande quantité, le choix du B737-700 MAX peut se justifier pour des besoins bien spécifiques. Comme Southwest Airlines est le plus gros client du B737, Boeing lui a probablement offert ses plus généreux rabais qui ont sans doute été un incitatif important pour le B737-700 MAX.

 

En septembre 2013, c’était au tour de la compagnie canadienne WestJet d’inclure 15 B737-700 MAX dans sa commande de 50 B737 MAX. À cette époque, Airbus et Boeing étaient engagés dans une course aux commandes et les deux belligérants se livraient une guerre de prix sans merci. Mais pour que WestJet inclut des B737-700 MAX dans sa commande alors que le C Series était sur le point d’effectuer son vol inaugural, il a sans doute fallu que Boeing soit encore une fois très généreuse avec ses escomptes.

 

 

La dernière commande de B737-700 MAX a été passée en décembre 2014 par la compagnie canadienne Jetlines et portait sur 5 B737-700 MAX en commande ferme avec des options pour 16 de plus. Cette commande comporte plusieurs éléments qui la sortent de l’ordinaire.

 

Premièrement, au moment de passer cette commande Jetlines n’avait même pas les liquidités suffisantes pour payer le dépôt afin de commander un seul B737 et malgré tout Boeing a accepté la commande. En fait, Jetlines n’avait toujours pas complété d’entente ferme qui lui aurait permis d’obtenir la capitalisation nécessaire au lancement de ses opérations aériennes. La compagnie aérienne n’avait alors même pas les moyens de louer un seul vieux B737 usagé afin de l’opérer et pourtant elle a réussi à passer une commande ferme de 5 B737-700 MAX.

 

Depuis décembre 2014, Jetlines n’est toujours pas venue à bout de lancer ses opérations aériennes et si sa situation financière s’est quelque peu améliorée depuis, elle ne se qualifie toujours pas pour la location d’un vieux coucou délabré. Il est donc raisonnable de se questionner sur la nature des accommodements que Boeing pourrait avoir consentis à Jetlines afin de lui permettre de se qualifier pour l’achat d’avions qu’elle n’avait tout simplement pas les moyens de se payer.

 

Jetlines veut être un transporteur à très bas prix et avoir les tarifs les plus bas au Canada; ce genre de compagnies aériennes est très présent en Europe et aucune d’entre elles n’a commandé de B737-700 MAX à cause de ses faibles performances économiques. Selon notre estimation, il est presque impossible d’opérer des B737-700 MAX de façon profitable dans le contexte d’un transporteur à très bas prix à moins de les obtenir à un prix qui serait nettement en dessous de son coût de fabrication.

 

Puisque le B737-700 MAX est un compétiteur du CS300 et que la transaction entre Boeing et Jetlines semble être très éloignée du cadre habituel, elle mériterait sans doute que les autorités canadiennes y jettent un coup d’œil afin de savoir si Boeing a livré une concurrence déloyale ou non à Bombardier en sol canadien.

 

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5 avis sur “Boeing a-t-elle fait du dumping au Canada?

  • Westjet a 13 737-600 et 59 737-700 dans sa flotte, normal qu’ils commandent des 737-7 pour en remplacer certains car ce ne sont pas toutes les routes qui nécessitent une capacité accrue. Westjet dans son contrat peut passer d’une version à l’autre, ils ont d’ailleurs réduit le nombre de 737-8 en commande de 40 à 30 au début de l’année pour commander 10 737-9. Westjet a 25 737-7 en commande et non 15. Southwest est également un grand utilisateur de 737-700, donc normal également pour eux de commander des 737-7.

    De toute façon, pour que Bombardier puisse porter plainte, il faudrait avoir une idée du prix payer par Westjet, ce que personne sait à part Boeing et Westjet. On a eu une explication hier de la façon dont Boeing a estimé le prix payé par Delta ( https://leehamnews.com/2017/08/08/delta-asks-commerce-redefine-scope-boeing-bombardier-case/ ).

    Vraiment pas sur que Bombardier veut se mettre Westjet et Air Canada à dos, deux très bon client. Boeing et Delta ne s’entendent pas depuis un bon moment déjà.

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  • Il ne faut pas sous-estimer la créativité de financement dans les ventes d’avions.

    Une des astuces que j’ai vues dans mon expérience est la combinaison de prêt bancaire avec le paiement des intérêts seulement pendant quelques mois, le temps de trouver une compagnie de leasing qui voudrait bien faire du « sale and lease back ».

    Ça nécessite pas un gros cash en amont. La seule condition est que le bien soit assez « fluide », c’est à dire qui se revend facilement.

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  • Félix Desjardins

    Je pense que Jetlines a eu une entente spectaculaire avec Boeing. Sur leurs site web ont peut voir que Boeing est un partenaire. Est ce que Boeing va louer ses avions à Jetlines? Personne ne le sait. Ont verra dans un ans, le moment prévu du début de l’exploitation.

    Aussi, je me demande pourquoi Jetlines n’a pas encore commandé de CSeries. Selon un article dans LaPresse+, Jetlines était obligé d’acheter des CSeries parce qu’il avait eu une exemption pour le 49%… Il y a quelque mois je pensais que c’était eux les clients qui voulait du CSeries en fin 2017.

    Pour terminer, il n’y a pas de routes vers le Québec selon leur carte prévue… décevant.

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    • André Allard

      En décembre 2014, Jetlines prévoyait débuter ses opérations dans la deuxième moitié de l’année 2015. Depuis le début de 2017 elle dit plutôt que les opérations débuterons prochainement. 🙂

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      • Félix Desjardins

        Il reste leur certificat et l’achat d’avions puis ils volent!

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