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CSeries : ce qui devait arriver arriva

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Aujourd’hui, marque le cinquième anniversaire du dévoilement de l’A220 qui est le nom qu’Airbus a donné au CSeries. Malgré le temps qui passe, plusieurs nostalgiques parlent encore de la cession du CSeries à Airbus comme étant un vol. Mais en réalité, à cette époque Bombardier avait deux choix : céder le programme ou y mettre fin. Dans ce texte, je fais un bref retour en arrière et dévoile certaines informations inconnues qui jusqu’à maintenant étaient inconnues du grand public. 

L’arrivée d’Alain Bellemare

C’est en février 2015, que Bombardier annonce de la nomination d’Alain Bellemare à titre de Président et chef de sa direction. Ce dernier jouit d’une bonne réputation alors qu’il provient de chez United Technologies Corp. 

Puis dans les mois qui suivent, d’étranges rumeurs concernant l’avenir du C Series commencent à circuler. Cela se résume à dire que le programme phare de Bombardier ne ferait plus partie des plans. Pour ma part, je me souviens que mon premier texte à avoir connu du succès sur les réseaux sociaux portait justement sur l’avenir de cet avion. J’avais expliqué que si la famille Beaudoin-Bombardier avait voulu se départir de C Series, elle n’aurait pas choisi un PDG provenant de l’industrie aéronautique. Selon mon analyse, si l’actionnaire de contrôle avait voulu rester dans les trains et quitter l’aéronautique, c’est une personne d’expérience dans le ferroviaire qui aurait été nommé en février 2015. Mais la suite des événements va prouver à quel point j’étais dans l’erreur.

Puis un premier coup de théâtre survient en octobre 2015 alors que l’on apprend qu’Airbus et Bombardier auraient tenu des discussions secrètes sur l’avenir du C Series. Les deux parties décident alors de mettre un terme à leur négociation. 

L’année 2017

En avril 2017, Boeing dépose une plainte auprès du département de commerce des États-Unis. Le géant américain accuse Bombardier de s’être livré à du dumping lors de la vente de 75 CSeries à Delta Airlines. Cette plainte fait alors peser une menace sur l’avionneur alors que ses finances se détériorent de trimestre en trimestre. 

Lors du salon aéronautique du Bourget 2017, la ministre québécoise de l’Économie et de l’innovation, Mme Dominique Anglade, avait le mandat de relancer les négociations avec Airbus. Alors que les discussions entre Airbus et Bombardier ont repris, le 27 septembre, le département du commerce impose un droit compensatoire temporaire de 220 % sur le CSeries.

C’est le 16 octobre qu’Airbus et Bombardier annoncent avoir conclu un accord concernant le CSeries. En gros, la compagnie québécoise cédait gratuitement une participation majoritaire du CSéries à Airbus. De plus le cédant devait assumer certains investissements, dont la construction d’une chaîne d’assemblage à Mobile en Alabama.

Des révélations surprenantes

En juin 2019, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec Alain Bellemare. Lors de l’entretien, M. Bellemare m’avait fait une déclaration « off the record » afin de « m’aider à mieux comprendre la cession du C Series ». J’ai donc gardé pour moi les affirmations d’Alain Bellemare. Mais quatre ans plus tard, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et je me permets maintenant d’en parler. 

L’essentiel des propos d’Alain Bellemare m’avait confié sur la cession du CSeries se résument ainsi : « quand j’étais chez Pratt et United, moi et mes collègues, on se demandait tous comment Bombardier allait réussir à financer le C Series. Puis lorsque j’ai été approcher pour prendre la direction, j’ai demandé à voir le bilan de Bombardier. Il ne m’a fallu que 30 minutes pour constater que le C Series devait sortir du bilan de l’entreprise afin d’éviter la faillite. »

Donc, lorsqu’Alain Bellemare arrive la tête de Bombardier en février 2015, il est déjà à la recherche d’un moyen pour se départir du C Series. Bref, les rumeurs du printemps 2015 étaient fondées. L’on pourrait discuter longtemps sur les causes nombreuses de la détérioration des finances de Bombardier qui ont mené à la cession du CSeries. Mais en février 2015, le sort en était déjà jeté. L’échec des négociations en octobre 2015 n’aura fait que retarder l’inévitable et alourdir les finances de Bombardier. 

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14 avis sur “CSeries : ce qui devait arriver arriva

  • Normand Hamel

    Intéressante confidence mais qui ne me surprend pas du tout parce que la direction de Bombardier de l’époque souffrait d’un sérieux manque de vision (pour le dire poliment) et surtout d’humilité. Ils ne manquaient pas d’ambition cependant, c’est certain.

    Si bien qu’ils ont lancé le Learjet 85 un mois à peine avant le CSeries en 2008. Mener conjointement deux ambitieux programmes, tout en sachant qu’à court ou à moyen terme la modernisation du Global s’avérerait nécessaire elle aussi afin de répondre à Golfstream qui reprenait petit à petit les commandes (dans tous les sens du terme) de l’aviation d’affaires suite au renouvellement de son propre portfolio, était de la pure folie. Je dirais même plus, réaliser quasi simultanément trois programmes majeurs: le Learjet 85, le CSeries et le Global 7000/8000, était faire preuve d’inconscience et d’insouciance, pour ne pas dire d’arrogance.

    Il faut savoir que Bombardier a englouti la coquette somme de 2,5 milliards USD (3,3 milliards canadiens) dans le Learjet 85, un avion de petite capacité mais comportant un très grand risque compte tenu des immenses défis rencontrés lors de son développement. On parle ici d’un avion fabriqué entièrement en carbone. Mais l’entreprise à l’origine du concept, Grob Aviation, a fait faillite au début du projet et au lieu d’en profiter pour mettre un terme au programme Bombardier a décidé de poursuivre l’aventure, pour ne pas dire la mésaventure, avec une technologie différente qui n’avait pas fait, et n’a d’ailleurs jamais fait, ses preuves. C’est sans doute la plus grave erreur de toute l’histoire de l’aviation canadienne et la plus mauvaise décision jamais prise par Bombardier. Il appartiendra aux historiens de l’aviation de déterminer qui est responsable de cette monumentale bévue.

    Mais avant de terminer je voudrais dire une mot concernant Alain Bellemare qui selon moi n’était que le porteur d’une très mauvaise nouvelle sans toutefois être le responsable des déboires de Bombardier et encore moins du CSeries. Par contre je remets en questions sa gestion de la division ferroviaire. Je ne suis pas un spécialiste de ce domaine mais clairement Bombardier Transport s’en allait droit dans le mur avant son arrivée et suite à son embauche la situation a continué de se détériorer. J’ai cependant du mal à mesurer sa part de responsabilité dans cette monumentale débâcle.

    Par contre peu de gens réalisent le rôle qu’a joué Alain Bellemare concernant l’installation à Mirabel de la production du PW800, de l’assemblage également à Mirabel du PW1500G, ainsi que du regroupement, toujours à Mirabel, des centres d’essais en vol de Longueuil et Plattsburgh. Ce que cela veut dire concrètement c’est qu’aujourd’hui non seulement le CSeries est assemblé à Mirabel mais ses moteurs le sont également. Les deux installations étant physiquement très proches l’une de l’autre. Si l’assemblage du PW800 à Mirabel était prévisible, celui des moteurs du CSeries était loin d’être acquis. Pour ce qui est du déménagement du centre d’essais en vol de Plattsburgh vers Mirabel cela relevait de l’utopie car un tel transfert était tout simplement impensable.

    Pourtant tout cela s’est réalisé grâce à la complicité de deux petits gars de chez nous: Alain Bellemare et Louis Chênevert. Ce dernier étant étant alors président de Pratt & Whitney aux États-Unis au même moment où le premier était président de Pratt & Whitney Canada. Quand on parle de l’importance d’avoir un bon réseau d’affaires, en voilà un exemple éclatant.

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    • Louis Martineau

      Bombardier n’était pas facile a gérer étant donner que son siège social était en Europe et des contrats un peu partout sur la planète et disons qu’A.Bellemare comme pdg de Bombardier aviation basé à Montréal était loin d’être un connaisseur du domaine ferroviaire il me semble. Je pense que l’actionnaire de contrôle la famille Beaudoin/Bombardier aurait dù former une autre compagnie avec la division transport ferroviaire comme avec la division produits récréatifs en 2003 qui est un succès. Quel idée saugrenue de mixé le développement et la fabrication de train et d’avion au sein de la même entreprise et confier la direction des deux divisions au même pdg.

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    • Un vrai compte de super héro!On dirait pas trop que c’est la suite de l’article principal qui tente d’embellir la réputation de bellemar! Il prend les commandes pour sauver une entreprise alors qu’il sait déja qu’il va la démonter….et finalement empocher des bonus et un salaire de vedette de cinéma! L’essentiel pour les employés et le Qc sont les résultats qu’il a générés, démontage graduel d’un entreprise, qui chaque fois qu’il laissait partir un morceau, en justifiait la décision par une légère hausse des actions comme résultante. Ses bonus étaient calculé en fonction de ses objectifs boursiers, peut importe la lente agonie de ce symbole québécois🤑

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  • Louis Martineau

    L’actionnaire de contrôle de Bombardier inc avait bien approuver la vente du programme c series. Son ex-pdg était au final que l’exécutant pour sauver la compagnie d’une éventuelle faillite. Le post Les Ailes du Québec le démontre assez bien de ce que je comprend. La réputation de l’ex-pdg de février 2015 au 05 avril 2020, en a pris un coup, mais il ne faisait que remplir son mandat que lui avait donner l’Actionnaire de Contrôle de la compagnie, soit sauver Bombardier inc d’une faillite et la perte de milliers d’emplois au Québec et en Ontario et la fin du seul avionneur Québécois développeur et fabricant.

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  • François Bouchard

    Il ne faut pas sous-estimer le rôle de Bombardier transport dans la débâcle financière de la compagnie. Il y a 40 ans, quand ils ont produit les trains de leur premier contrat avec New York, ils ont eu des problèmes avec le fonctionnement des portes. Eh bien 40 ans plus, ils avaient un autre contrat avec New York qui prenait l’eau en raison d’un problème de portes de train en même temps qu’ils testaient le global 7500 à la vitesse du son. Une compagnie qui fait des avions supersoniques, mais incapable de dégoguer des portes de train.

    Ce n’est pas les mêmes individus qui travaillent sur ces projets différents, mais quand même! La division des trains, pourtant immense, ne dégageait jamais de profits substantiels qui auraient pu renflouer les autres divisions. Évidemment, de grosses erreurs ont été commises, énormes d’ailleurs. Le petit Beaudoin a trop ratissé large à l’époque, Bellemare a essayé, mais il a fini par juste liquider les morceaux qui ne pouvaient pas être sauvés.

    Depuis ce temps-là, on assiste à un resserrement de leur activités, ils développent le service après vente pour avoir des revenus constants dans les temps durs et ils essaient de baisser la dette avant la prochaine récession. Celle-ci, avec les taux qui montent, ne peut que coûter plus cher.

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  • La Plus Grosse et Simple Raison est qu’il as Fait Comme Donald Trump Joué Avec le Système FISCAL Emprunter Plus Dépenser Plus Et Un Jour Ce Qui Devrait Arriver Arrive Comme Beaucoup de Canadiens Point Final.

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  • Corrigées quelque faut de tapage. Merci.

    Bonjour,

    Merci beaucoup pour votre éloquent commentaire. Il démontre qui reste encore énormément de travail à faire de la part du CA de BBD afin de nettoyer le prestige de la compagnie et de redonner le lustre perdu dans des années de combats passées.

    Encore une fois, nous sommes dans la LNH de l’Aéronautique est nous avons besoin d’une équipe de direction et un DG affamés pour nous conduire vers la coupe Stanley (plus de 125$ l’action). Vous pouvez le faire, donc fait-le, sinon démissionnez. Qu’est-ce que vous attendez?
    Pour rire aux médias, mettre les gens dehors quand ça va mal et signer de bonus de fin d’année n’importe qui d’entre nous peut le faire.

    Mais je me demande par où on s’en va sans des entrepreneurs courageux capables de prendre des risques pour développer des produits innovants à la fine pointe de la technologie, avec du caractère pour aller encore plus loin et créer des emplois bien payés pour tous.
    Qu’est-ce qu’on va faire ici, retourner à la ferme, même pas elles ne sont de plus en plus rentables et en voie de disparition. Ah oui, attendre pour les miettes du gouvernement pour contrer l’inflation de nos jours.
    La destruction du tissu économique est déjà entamée avec la financiarisation de l’économie à l’échelle planétaire.
    Est-ce qu’on va fabriquer seulement aux USA et en Chine? Est-elle la seule option?
    L’Allemagne est en récession (faute du gaz bon marché), la France brûle de partout et la cour est plaine en Europe avec l’Euribor à 4%

    Question : Combien des milliards pour VW et Stellantis? J’ai perdu le compte.

    Ben non, La Plus Grosse et Simple Raison est d’avoir resté au Canada et de ne pas aller s’installer chez nos voisins du sud.

    Désolé.

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  • Nicolas Robert

    Sérieusement pas notre problème, ils ont accepté les conditions du prêt de 2 milliards de Québec Ben ils le remboursent , sinon c’est très exactement du vol , ou a tout lepins de la fraude

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