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E-Jet contre CRJ, le mauvais choix d’Embraer

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Au 31 mars 2013, le fabricant brésilien Embraer avait obtenu 245 commandes fermes pour l’E-175 dont 159 en sol américain contre 86 pour le reste de la planète. Les États-Unis représentaient donc 65% des ventes de cette variante de l’E-Jet. De son côté, la compagnie montréalaise Bombardier avait enregistré un total de 314 commandes fermes pour le CRJ-900, qui est l’équivalent de l’E-175 en termes de capacité de passagers. Avec 215 commandes fermes, les États-Unis représentaient à l’époque 68% des ventes de CRJ-900 contre 32% dans le reste du monde.

 

Le marché américain des avions régionaux a toujours été celui qui dominait, car historiquement il représente environ 75% du marché mondial. Il existe aux États-Unis une clause qui limite la taille des avions régionaux à 76 passagers et leur masse maximale au décollage à 86 000 livres. Étant donné la taille du marché américain, cette clause de limitation dicte la taille et le poids des avions régionaux.

 

Au début des années 2010, la rumeur que la clause américaine de limitation des avions régionaux allait être modifiée à la hausse circulait dans le milieu du transport aérien et des fabricants d’avions régionaux. C’est en se basant sur cette rumeur qu’Embraer n’a pas hésité à lancer l’E2-175, qui est une version remotorisée de l’E-175, et ce même si sa nouvelle masse maximale au décollage excédait la clause de limitation du moment.

 

En 2013, voyant que Bombardier était aux prises avec le développement de trois programmes d’avions, le Learjet-85, le Global 7000 et le C Series, Embraer a voulu saisir cette opportunité pour faire la guerre au CRJ-900, car elle savait que les finances de Bombardier seraient mises à rude épreuve dans les années à venir. Elle a donc tenté d’obtenir la totalité des commandes des compagnies américaines, peu importe le prix. Durant cette période, Embraer a décroché 355 commandes pour l’E-175 aux États-Unis contre à peine 29 pour le CRJ. Embraer s’est donc emparé de plus de 90% des parts de ce marché dominant, remportant cette bataille de façon éclatante. Mais cette victoire perd un peu de son lustre lorsque l’on regarde le restant du marché; Embraer n’a réussi à vendre que seulement 4 E-175 en dehors des USA depuis 2013 tandis que Bombardier a vendu 111 CRJ-900 ailleurs dans le monde. Au total pour cette période Embraer a tout de même réussi à contrôler 73% des parts du marché mondial des avions régionaux.

 

La stratégie d’Embraer avait du sens dans la mesure ou la clause de limitation serait revue à la hausse, car le but ultime était de s’accaparer de ce marché avant que Bombardier ne puisse se retourner et elle aussi remotoriser le CRJ-900. Mais le résultat final de la bataille qu’a livrée Embraer au CRJ aura été très néfaste pour l’E2-175 puisqu’elle n’a pas réussi à décrocher une seule commande en dehors des États-Unis. Comme la clause de limitation est demeurée inchangée, Embraer a été obligée de reporter l’entrée en service de l’E2-175 à 2021 toujours avec l’espoir que la clause de limitation soit modifiée d’ici là. En fait Embraer n’a toujours qu’un seul client pour l’E2-175 et c’est Skywest qui en a commandé 100 en 2013.

 

Si la victoire de l’E-175 contre le CRJ-900 sur le marché américain ne fait pas de doute, elle aura grandement contribué à mettre fin à l’E2-175 avant même qu’il ne soit produit. Pendant ce temps, les dernières améliorations que Bombardier a apportées au CRJ-900 lui permettent de reprendre des parts de marché tout en préservant sa marge bénéficiaire. Loin d’avoir été éliminé, le CRJ-900 est toujours en vie. Le choix d’Embraer de lancer une guerre de prix et de miser sur d’hypothétiques changements à la clause de limitation aura été la mauvaise stratégie.

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5 avis sur “E-Jet contre CRJ, le mauvais choix d’Embraer

  • BernardP

    Que va t-il se passer avec la commande de Skywest?
    Elle peut être transformée pour des E-175 de génération actuelle, ou allouée au CRJ-900, du moins en partie.
    Skywest a aussi en commande 100 MRJ90 de Mitsubishi, des appareils qui ne rencontrent pas la scope clause.

    Bombardier est en position de faire une brèche dans ces deux commandes.

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    • Ces deux commandes sont conditionnelles à ce que les clauses de limitations soient modifiées, par-contre il y a probablement une date limite avant de pouvoir les annulés. Pour la commande d’Embraer, elle sera sûrement modifié en E1. Celle du MRJ sera entre Bombardier et Embraer ou un seul des deux.

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  • Je dirais que le plus mauvais choix provient de Mitsubishi….

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    • André Allard

      Le MRJ est un programme qui est voué à l’échec et je doute qu’il s’en vende plus de 100. Le MRJ-90 pèse 6 à 7 tonnes de plus que ce qui était prévu et il n’offre plus aucun avantage compétitif par rapport au CRJ-900 ou encore l’E-175. Le MRJ-70 peut contenir 70 passagers à la condition d’être configuré en une seule classe alors que ses deux concurrent offre la possibilité d’avoir des sièges de première classe avec 70 passagers. De plus les CRJ-900 et l’E-175 peuvent être configurés à 76 passagers tout en rencontrant le clause de limitation.

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