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AÉROSPATIALE ET INDUSTRIE 4.0 LE NÉCESSAIRE VIRAGE NUMÉRIQUE

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Suzanne M. Benoît
Présidente-directrice générale
Aéro Montréal

De tout temps, l’industrie aérospatiale québécoise a fait sa marque par son inventivité, son audace et ses capacités hors normes à répondre, voire anticiper les besoins des clients. Ce trait de caractère de nos entreprises, pourrait-on dire, est déterminant pour que notre chaîne d’approvisionnement demeure parmi les plus performantes au monde.

Dans une industrie aussi cyclique et concurrentielle que l’aérospatiale, les changements s’effectuent à une vitesse exceptionnelle et la capacité d’adaptation de chaque entreprise, maîtres d’œuvre comme PME, doit être tout aussi rapide. Tout un défi!

Aujourd’hui, la transformation numérique qu’implique l’avènement des technologies dites « de rupture » dicte une nouvelle donne. La révolution du 4.0 se caractérise entre autres par l’automatisation, la numérisation, l’Internet des objets, l’analytique des données, la réalité virtuelle augmentée et l’intelligence artificielle. De nos jours axé davantage sur la transition de l’usine traditionnelle à l’usine du futur, le virage technologique s’étendra éventuellement à toutes les fonctions de l’entreprise : de la conception d’un aéronef au service à la clientèle, en passant par les ventes, les finances, etc. Contrairement à ce que l’on pourrait penser lorsqu’il est question de technologies aussi pointues et nouvelles, l’humain se trouve au cœur même de la réussite de cette transformation.

L’industrie 4.0 est basée sur la communication. Or, la communication entre les systèmes et les machines ne serait pas possible sans l’apport essentiel du capital humain, qu’il soit client, fournisseur, gestionnaire ou technicien. Cette quatrième révolution industrielle, comme toutes les autres avant elle, répond à un objectif : améliorer la productivité de l’entreprise en réduisant les coûts tout en améliorant la qualité et la fiabilité du produit.

Nous passons à l’ère du manufacturier innovant et, pour ce faire, les entreprises de l’aérospatiale du Québec doivent accroître leurs capacités technologiques pour être en mesure de se positionner avantageusement sur les marchés régionaux et internationaux.

Nos entreprises de l’aérospatiale sont-elles réellement prêtes à prendre ce virage?

Il ne fait pas de doute que nos entreprises québécoises sont conscientes des enjeux et des défis que cela représente, à commencer par une remise en question de leur modèle d’affaires. Toutefois, pour assurer la réussite de cette transition, les moyens mis en place doivent être à la hauteur des ambitions que l’on vise. Les gouvernements fédéral et provincial ont annoncé dans leurs récents budgets respectifs des mesures pour favoriser les investissements des entreprises en R et D, pour l’acquisition d’équipements de pointe et le développement des compétences afin que les PME bénéficient d’une plus grande capacité d’innovation technologique. Nous croyons que ces incitatifs sont un excellent pas dans la bonne direction mais beaucoup reste à faire pour maintenir l’excellente réputation dont jouit la grappe aérospatiale du Québec sur la scène mondiale.

En s’engageant dans cette révolution, les entreprises devront compter sur une main-d’œuvre dont les compétences vont évoluer. Ce changement interpelle les institutions d’enseignement secondaires, collégiales et universitaires pour s’assurer de l’adéquation entre les besoins des entreprises et le développement de compétences 4.0. La formation continue est l’une des premières avenues qui permettra d’adapter plus rapidement ces deux réalités. L’effort de transition se retrouve donc dans l’ensemble de l’écosystème qui fait la force de notre secteur.

Un certain nombre d’entreprises du Québec, que ce soit des maîtres d’œuvre ou des PME, ont déjà cerné les besoins qu’allait impliquer le virage numérique avec la vision d’une « entreprise numérique » regroupant des aspects liés à la conception, la fabrication, la chaîne d’approvisionnement, le service à la clientèle, etc. Toutefois, les PME doivent accentuer leurs efforts pour prendre ce nécessaire virage.
D’une révolution industrielle à l’autre, les changements surviennent de plus en plus rapidement et celle-ci est loin de faire exception. C’est maintenant qu’il faut passer à l’action!

Montréal est la troisième capitale mondiale de l’aérospatiale. Au Québec, cette industrie a généré en 2016 un chiffre d’affaires de près de 15 milliards de dollars et compte environ 40 000 emplois. L’aérospatiale est un moteur économique qui doit sans arrêt se renouveler.
Aujourd’hui, le défi est grand mais demain, les opportunités continueront de faire de notre industrie l’une des plus performantes au monde.

Suzanne M. Benoît
Présidente-directrice générale
Aéro Montréal

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8 avis sur “AÉROSPATIALE ET INDUSTRIE 4.0 LE NÉCESSAIRE VIRAGE NUMÉRIQUE

  • Normand Hamel

    Montréal dispose d’un atout unique pour la révolution 4.0, car elle est déjà la capitale mondiale de l’intelligence artificielle (AI). En effet on trouve ici la plus grande concentration au monde de chercheurs dans ce domaine très pointu; et Montréal a donc une assez bonne longueur d’avance dans cette course. Ce qui fait la particularité de Montréal est qu’on y trouve quatre universités de calibre mondial. Comme pour l’ensemble de l’industrie l’intelligence artificielle est appelée a révolutionner l’industrie aérospatiale. Et comme Montréal est déjà numéro 1 pour l’AI et numéro 3 pour l’aéronautique, cela donne l’équation suivante: 1 + 3 = 4.0! 😉

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    • Mais il faut dire qu’on est 30 ans en arrière en ce qui concerne la robotique. Avant le Cseries, n’essayez pas de trouver des robots sur une ligne d’assemblage et encore aujourd’hui Bombardier est le seul qui utilise (un peu) les robots pour l’assemblage (Cseries seulement) alors qu’en Europe, les ailes et les jonctions de fuselage c’est fait par des robots depuis les années 80. Chez les sous-traitants c’est encore les années 70, un seventies qui voyagerait dans le temps verrait à peine la différence.

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      • Normand Hamel

        J’ai le vague souvenir que l’année du 25e anniversaire de l’acquisition de Canadair par Bombardier (1986-2011) Laurent Beaudoin (le patriarche) avait lancé une initiative pour initier les jeunes à la robotique. Je ne sais cependant pas ce qui en est advenu par la suite.

        Lorsque l’on dit que le Québec accuse un certain retard au niveau de la productivité de ses entreprises cela est en grande partie lié au fait que les PME ne modernisent pas suffisamment leurs équipements et tardent à faire entrer des robots dans leurs entreprises. Je crois d’ailleurs qu’il y a une nouvelle initiative du gouvernement du Québec qui vise à encourager les PME à effectuer le virage technologique qui s’impose. Je crois que des représentants du gouvernement rendent visite à certaines entreprises ciblées afin de leur démonter les avantages de la robotisation, et même aussi je crois pour les aider financièrement, du genre crédits d’impôt ou prêts garanties, à faire l’acquisition de nouveaux équipements. Très souvent ces entrepreneurs ne réalisent pas, avant qu’on leur explique, les avantages qu’ils peuvent tirer de la robotisation.

        En ce qui concerne ce que tu dis Nicholas à propos de la robotisation en Europe il faut savoir que Boeing est elle aussi très en retard par rapport à Airbus, et ce n’est que très récemment qu’elle a décidé de commencer à fabriquer ses avions à l’aide de robots. Je crois que la toute première initiative en ce sens a été réalisée pour la fabrication et l’assemblage du 777X. D’ailleurs la productivité d’Airbus a toujours été supérieure à celle de Boeing. C’est à dire qu’elle utilise moins de personnel pour fabriquer un avion. Cependant Boeing fabrique davantage d’avions à chaque année parce que ses employés font beaucoup de temps supplémentaire et prennent peu de vacances.

        Pour l’avenir à moyen terme il est à envisager que l’avance technologique que détient Montréal dans le domaine de l’intelligence artificielle aura une incidence sur l’automatisation de l’industrie québécoise; ce qui pourrait avoir pour effet à terme d’augmenter dramatiquement sa productivité. Je suis heureux de constater que Aéro Montréal oeuvre pour sensibiliser tous les joueurs de l’aérospatial au Québec afin qu’ils effectuent le plus tôt possible le virage 4.0 qui leur permettra de rester compétitifs et de prospérer.

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  • Boeing utilisent les robots depuis longtemps, particulièrement pour les ailes avec les machines d’Electroimpact, sur les fuselages c’est plus récent mais tout de même utilisé depuis un certain temps sur le 777 et le 787:

    https://www.youtube.com/watch?v=GevBp3nj878
    https://www.youtube.com/watch?v=t7ix0t4ivE0

    En Europe même de petits constructeurs comme Dassault (40-50 avions par année) assemble pratiquement tout l’avion avec des robots:

    http://www.dassaultfalcon.com/en/_layouts/DassaultFalcon.PublicPortal/MediaVideo.aspx?Video=/PublishingImages%2fVIDEOS%2fBehind+the+scenes%2fFALCON_8X_MAKING_OF-1280×720.mp4&Media=Video&Autoplay=true

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    • Normand Hamel

      Pour le 787 Boeing n’avait tout simplement pas le choix à cause du CFRP, mais cela demeure un avion très couteux à assembler malgré la technique d’assemblage qui se veut très moderne. Par contre tu es complètement dans l’erreur lorsque tu dis que Boeing utilise des robots depuis longtemps. D’ailleurs tes deux vidéos datent de 2017 et 2016 respectivement, et sont donc postérieures au C Series. Jusqu’à tout récemment Boeing avait toujours fabriqué le 777 à la main. Et mis à part le Dreamliner tous les avions de Boeing ont toujours été fabriqués entièrement à la main.

      Cela fait près de six ans que j’explique aux lecteurs américains de Leeham News and Comment que Boeing est très en retard sur Airbus au niveau de la fabrication. Et ces mêmes Américains se vantent que le 777 est le premier avion entièrement conçu sur ordinateur. Mais ils ne réalisent pas que le logiciel qui a été utilisé vient de Dassault justement (CATIA), alors que dans leur esprit il s’agit d’un produit IBM, car elle en a obtenu les droits pour les USA et vend les ordinateurs qui vont avec.

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      • ces robots sont utilisé depuis longtemps par Boeing, surtout les machines Electroimpact pour les ailes.

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        • Normand Hamel

          Les robots dont tu parles sont très récents, comme en atteste les deux vidéos que tu as toi-même fournies, et comme le démontre également les nombreux articles que j’ai lus dans Aviation Week ces dernières années (je suis abonné depuis 1979).

          Pour ce qui est des machines Electroimpact je n’ai jamais eu l’impression qu’il s’agissait de robots à proprement parler mais plutôt de simples riveteuses électro-mécaniques; et tellement peu sophistiquées qu’elles ne pouvaient pas être utilisées ailleurs que sur les ailes qui offrent des surfaces planes, donc 2D. La particularité des robots est leur grande autonomie et leur aptitude à travailler en 3D. En passant, j’ai souvent échangé sur le site de LNC avec l’ingénieur de Boeing qui était impliqué dans le design des Electrocompact et il n’a jamais utilisé le terme de robot en référence à ces riveteuses. Ces machines sont tellement vieilles que leur designer est à la retraite depuis de nombreuses années, et vers la fin de sa carrière chez Boeing il s’occupait du syndicat des ingénieurs.

          Je pourrais ajouter à cela que ce n’est qu’en 1997/1998 que Boeing a fait la transition du papier vers l’ordinateur au niveau de la production, et ce fut une catastrophe monumentale car Boeing essayait en même temps d’augmenter la cadence de production. Le résultat fut que la production a été arrêtée complètement pendant de nombreuses semaines, et plus d’un mois pour le 737, entre autres.

          Et ce que Boeing a fait avec de Havilland Canada lorsqu’elle en était propriétaire n’est pas passé à l’histoire comme une référence en la matière. C’est en fait Bombardier qui a assuré la pérennité de ce fleuron de l’industrie aérospatiale au Canada. Le fait est que Boeing est dans un long déclin depuis les années 80. Et comme par hasard cela correspond à la période où Airbus a amorcé sa fulgurante ascension.

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          • Peu importe qu’on utilise ou pas le terme robot c’est tout de meme de l’automatisation, chez Bombardier chaque trou des ailes est percé manuellement avec des gabarits et des perceuse Q-Matic…

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