AérospatialeBombardierHistoire

CRJ, la fin d’une belle aventure

Pour partager cette publication :

 

Maintenant que la fin de la production du CRJ est annoncée, voici les grandes lignes de son histoire.

 

Les débuts

Lorsque Bombardier fait l’acquisition de Canadair en 1986, des ingénieurs de cette dernière avait déjà évoqué la possibilité d’étirer le fuselage du Challenger 600 afin de pouvoir transporter des passagers sur de courts vols commerciaux.

L’idée a plu à Bombardier qui autorise le développement de ce nouveau programme d’avions qui portaient alors le nom de Challenger 800. Le nom sera finalement remplacé par Canadair Rgional Jet et c’est le 10 mai 1991 que le CRJ 100 effectuait son vol inaugural à l’aéroport de Dorval. À ce moment-là, Bombardier n’avait obtenu que trois commandes fermes pour le CRJ 100 qui pouvait transporter 50 passagers. Le premier exemplaire fut livré à Lufthansa en octobre 1992, marquant le début d’une formidable aventure.

Montréal-Trudeau en hiver
Deux CRJ à Montréal-Trudeau

Le belle époque

Plus petit et plus léger que les MD 80 encore en production, le Canadair régional Jet est le premier avion à réaction de 50 places dont l’exploitation est rentable pour les grandes compagnies aériennes. C’est grâce au CRJ que les grandes compagnies aériennes américaines ont été en mesure d’établir la stratégie des plaques tournantes (hub and spore en anglais). Les économies de coût d’opération générées par les plaques tournantes ont permis au compagnies aériennes traditionnelles de faire face à la compétition des transporteurs à bas prix.

 

Au début des années 2000, les CRJ se vendent comme des petits pain chauds; les compagnies qui courent après Bombardier afin de pouvoir placer leurs commandes le plus rapidement possible. En 2003, la production du CRJ atteint son sommet avec 214 appareils livrés.

 

Le programme d’avions CRJ a donné un extraordinaire coup d’accélérateur à toute la grappe aérospatiale québécoise dont le nombre d’employés est passé de 30 000 à 40 000 durant les 25 années de sa production. Les gouvernements ont investi 375 M $ dans ce programme leur permettant de toucher en retour des royautés totalisant près de 656 M $. Au total 1950 CRJ auront été livrés lorsque la production prendra cessera vers le fin de 2020.

CRJ 900 Delta Connection
CRJ 900 Delta Connection

L’arrivée de la compétition

C’est en 2004 que la compagnie brésilienne Embraer livre son premier E-Jet E170 lequel sera suivi de l’E175 qui est un compétiteur direct du CRJ-900. Bien qu’il pèse presque le même poids que l’E-175, le CRJ-900 consomme un peu moins de carburant, mais pas assez pour contrebalancer le prix plus bas de l’E-175.

 

Afin de le rendre plus compétitif, Bombardier a lancé le programme CRJ-900 Next Gen en 2007 en améliorant sa consommation de carburant. Cela a donné de bons résultats quoiqu’insuffisants ; l’effondrement du prix du pétrole en 2015 rendra inutile les économies de carburant du CRJ-900 Next Gen.

 

 

Le fardeau du CRJ

Durant plusieurs années, Bombardier garantissait aux compagnies aériennes la valeur résiduelle des CRJ à la fin du contrat de financement. Si le propriétaire n’était pas en mesure d’obtenir le prix garanti, Bombardier devaitt reprendre l’appareil à la valeur indiquée dans le contrat ou encore verser la différence entre le prix de vente et la valeur résiduelle garantie.

 

Puisque le marché des avions régionaux a atteint sa maturité et qu’il y a peu de croissance, la valeur des CRJ usagés est en dessous de la valeur résiduelle garantie par Bombardier. Le montant de la facture est évalué à 600 M $ US que Bombardier aurait eu à payer au cours des prochaines années. Cela représentait un poids énorme pour un programme d’avions qui n’arrivait plus à générer des profits et qui était de moins en moins facile à vendre.

 

Ce n’est certainement pas la fin idéale, mais c’était le temps de prendre une décision.

 

L’avenir

Des 1 600 emplois du programme CRJ, 1 200 seront transférées à Mitsubishi. Sur les 400 qui restent, environ 250 sont sur l’assemblage et les 150 autres à la planification et à la gestion. Grâce à la montée en cadence de l’A220, une partie des travailleurs seront transférés à Airbus alors que les autres seront réaffectés dans la division d’avions d’affaires principalement sur le programme du Global 7500. Tenant compte également des nombreux départs à la retraite, il serait fort surprenant qu’il y ait des mises à pied liées à cette transaction.

Ligne d'assemblage du CRJ
Ligne d’assemblage du CRJ

La conclusion d’une entente entre Bombardier et Mitsubishi est le signal qu’attendait la grappe aérospatiale québécoise afin de lancer son opération de charme auprès de Mitsubishi. Voici ce que le présidente d’Aéro Montréal, M. Suanne Benoit avait à dire à propos de cette transaction : « L’annonce de l’acquisition du programme d’avions régionaux Canadair par Mitsubishi Heavy Industries constitue une formidable opportunité pour la grappe aérospatiale du Québec. Après avoir attiré Airbus au sein de notre écosystème l’an dernier, Mitsubishi constitue le 6e maître d’œuvre à venir s’implanter dans le Grand Montréal. Cette arrivée ouvre la porte à nos entreprises au marché asiatique qui constitue un marché en très grande croissance sur la scène aérospatiale. »

 

C’est donc le début d’un nouveau chapitre pour l’industrie aérospatiale montréalaise.

>>> Suivez-nous sur Facebook et Twitter

17 avis sur “CRJ, la fin d’une belle aventure

  • Pour les emplois, pas sur qu’ils soient transféré à MHI puisque la production des CRJ restant est « sous-traité » à Bombardier au nom de MHI, donc techniquement je crois que les employés resteront à Bombardier mais je peux me tromper.

    « En vertu de cette entente, MHI fera l’acquisition des activités de maintenance, de soutien, de remise à niveau, de marketing et de vente relatives aux avions CRJ Series, y compris les activités du réseau de service et de soutien situées à Montréal, Québec à Toronto, Ontario, à Bridgeport, Virginie-Occidentale et à Tucson, Arizona, ainsi que les certificats de type. »

    « Bombardier conservera le site de production d’avions CRJ à Mirabel, au Québec. Elle continuera à fournir des composants et des pièces de rechange et construira les avions CRJ du carnet de commandes actuel pour le compte de MHI..

    Répondre
    • André Allard

      Des 1200 emplois transférés à Mitsubishi, 900 sont dans les trois centres de services aux USA les 300 qui restent sont ceux du centre de support de Mirabel et ceux de l’ingénierie et des ventes dont Mitsubishi a également fait l’acquisition. Ce sont les chiffres donnés par Alain Bellemare ce matin, ils diffères quelque peu de ceux que j’avaient la semaine dernière au Bourget mais sont dans le même ordre de grandeur.

      Répondre
      • Ah d’accord. Donc les employés de production restent avec Bombardier.

        Répondre
  • Eric Tremblay

    Bon, au moins ça garde la même convention collective en place et on sauve le stress d’une renégociation (et toute la dé-information associée, qui au final laisse des séquelles).

    Je suis confiant que tous les 400 employés seront remplacés (ou en retraite) au bonheur de tous.

    Répondre
    • Eric Tremblay

      Je voulais dire que tous seront « replacé »… (pas remplacés)

      Répondre
  • Je ne sais pas combien ça couterait un CRJ bon pour la casse transformé en maison mobile.

    Répondre
  • Il est évident que la position quasi-monopôle avant l’arrivée d’Embraer était bien confortable.

    Encore heureux, il y a quelqu’un pour reprendre ce qui reste du CRJ à 550 million et en plus le repreneur prend en charge 200 million de dettes et de responsabilités (liabilities).
    C’est une très bonne affaire pour Bombardier.
    Sans compter le fait que Canadair a été acquise sans vraiment dépenser beaucoup d’argent.

    Répondre
  • Une question intéressante a été posé sur Airliners: si le certificat de type des CRJ a été vendu à MHI qu’arrive-t-il avec le CL650, puisqu’il est sur le même certificat que les CRJ?

    Répondre
    • André Allard

      Quand un CRJ est convertie en bizjet, il est alors enregistré comme un Challenger 850 et non pas Challenger 650, je crois qu’il y a confusion ici. Quand on y penses bien, pour que le CRJ soit sur le même certificat de type que le Challenger série 600, au moment de sa certification il aurait fallut un certificat de type supplémentaire pour chacun des systèmes qui a été modifiés: fuselage allongés, ailes, réservoirs de carburant, toilettes, ventilation, sorties de secours, finition intérieur, etc. À vérifier mais je doute fort que ce soit le même certificat de type.

      Répondre
        • André Allard

          Oui je viens de trouver l’information les deux ont le certificat de type A-131 de Transports Canada, voilà donc une situation intéressante mais qui se règle sans doute avec quelques discussions entre avocats. Soit BBD a cédé des droits partiels à MITAC sur le certificat de type ou encore MITAC a fait l’acquisition de tous les droits et cède un privilège à Bombardier. Si c’est la deuxième option, alors cela soulève la question de l’avenir du Challenger série 600. Est-ce que BBD considère que le 650 est la dernière version?

          Répondre
          • Des constructions «sous licence» se fait encore.

    • Ça sent l’annonce d’un nouveau CL650.

      Maintenant BBD n’a plus aucune chance de revenir dans le commercial. Ils n’ont plus rien. Recommencer de zéro coûtera une petite fortune même si le nouveau 650 pourrait être certifier en RJ.

      Répondre
      • D’ailleurs BBD a toujours des ingénieurs a occupé. Donc ils doivent travailler là dessus déjà. Je ne les voient pas travailler sur un nouveau Learjet. S’ils vendent toujours 25 850 par année, ça vaudrait la peine d’offrir plus moderne même si ça pourrait prendre 8-10 ans avant de voir le nouveau modèle.

        En passant, on ne sait toujours pas qui va acheter Shorts. La vente est bloquée par AIRBUS ???

        Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *