Aérospatiale

B737MAX comme un mal de dent

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Le moment du retour en vol du B737MAX se précise alors que les agences règlementaires ont complétée leur revue respective. Pour ma part, ma position sur le retour en service du B737MAX n’a pas changé : ce n’est pas la fin des problèmes pour Boeing mais plutôt le contraire. Voici deux aspects peu discuté du fiasco entourant le MAX. 

L’autre échec de Boeing

En communication et relation médias le principe de base pour gérer une crise est le suivant : ne tentez pas de nier le problème, reconnaissez-le, parlez en ouvertement et surtout ne cherchez pas à vous défiler. 

Dès le premier écrasement, celui du vol 610 de Lion Air, Boeing s’est précipité afin de pointer du doigt la compagnie aérienne. Le fabricant a mis l’emphase sur le bilan de sécurité déficient de Lion Air. Le même scénario s’est reproduit après l’écrasement du vol 302 d’Ethiopian Airlines. Malgré plusieurs évidences, Boeing a continué de nier toute responsabilité pendant des mois. 

La deuxième moitié de 2019 a été dévastatrice pour la réputation de Boeing, du B737MAX et de la FAA. Les révélations troublantes se sont succédées à un rythme ahurissant. L’amateurisme et le déni dont a fait preuve Boeing dans la conception et le développement du MCAS sont absolument renversants. Après les 346 victimes causées par une défaillance organisationnelle, l’échec médiatique est l’autre catastrophe causée par une culture d’entreprise déficiente. 

Au cours des 12 prochains mois, le B737MAX fera l’objet d’un suivi sans précédent dans l’histoire de l’aviation. À l’ère des logiciels de suivi radar, tous les vols du MAX seront scrutés à la loupe. Le moindre problème fera l’objet d’une couverture disproportionnée comme c’est le cas actuellement pour le B787. Or Boeing continue de gérer ses relations publiques comme dans les années 80, avant les réseaux sociaux. Le fabriquant du MAX se dirige donc vers une nouvelle catastrophe médiatique en 2021. 

La situation des compagnies aériennes

À l’exception de la Chine, la demande mondiale en transport aérien peine à atteindre 40 % de sa capacité. Les compagnies aériennes se préparent à faire des mises à pied massives et continuent de remiser des avions. Alors que la pandémie se prolonge, les compagnies aériennes doivent lutter pour leur survie. 

D’une certaine manière, les compagnies aériennes ont été en mesure de tirer profit de l’interdiction de vol du B737MAX; Boeing doit verser d’importantes compensations financières aux compagnies qui avaient un total de 375MAX en service. La COVID-19 a réduit considérablement la demande pour le transport aérien. Les compagnies aériennes qui ont des MAX reçoivent donc une compensation pour des avions dont elles n’ont pas besoin. Mais une fois l’interdiction de vol levée, les 375 MAX déjà livrés retournent à la charge des opérateurs. En plus, ce sont les compagnies aériennes qui devront faire les nombreuses modifications afin de remettre les avions en service. 

Pour comprendre la situation des compagnies aériennes, imaginez-vous ceci : vous êtes hospitalisé depuis des mois à cause d’une maladie grave. Vous êtes affaibli et les médecins considèrent que la guérison sera très longue et votre moral est bas. Mais en plus vous êtes forcé d’aller chez le dentiste pour un mal de dent. Finalement, ce dernier vous informe que vous devez subir un traitement de canal : quelle joie n’est-ce pas!  

Pour les compagnies aériennes, le retour en service du B737MAX c’est le traitement de canal en pleine maladie. Elles n’ont vraiment pas besoin de cela. Et en plus, elles devront dépenser des sommes supplémentaires en relations publiques. Dites-vous que cela n’est qu’une petite partie des problèmes à venir. 

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17 avis sur “B737MAX comme un mal de dent

  • louis martineau

    Un portrait réaliste et non complaisant de Boeing. Bravo aux site Les Ailes du Québec.

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  • Tom Laflamme

    Il faudra se poser la question si dans un contexte de réduction du transport aérien les transporteurs pourront imposer le Max aux clients, parce que je ne crois pas que la clientèle voudra suivre, j’ai fait un petit sondage maison dans mon entourage et même avec des billets gratuits ils refuseraient majoritairement d’embarquer.

    Boeing devra faire un exercice de promotion sans fautes pour le retour du Max, mais du haut de leur tour d’ivoire j’ai bien peur que ce soit un autre rendez-vous manqué.

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  • Serge Beauchemin

    Qui va vouloir être passager sur un 737MAX?

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    • Qui va vouloir être passager sur un 737 MAX ?
      Je pense que pratiquement 99% des passagers ne savent même pas sur quel avion ils voyage.
      Pour le reste, bien, ils peuvent prendre d’autres avions s’ils veulent ou s’ils PEUVENT.

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      • Nicolas

        Exactement, et 99% je vous trouve généreux, j’aurais dis 99,9%

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        • MarcelC.

          Concernant l’ignorance des usagers en matière d’avion, je pense que les consommateurs ne sont pas si dupes que ça. Ceux-ci peuvent exiger une divulgation d’identité de l’appareil dans lequel ils doivent monter.

          https://globalnews.ca/news/7275397/coronavirus-boeing-737-max-future/

          « Air Canada and WestJet are among the airlines that will inform passengers of the model of aircraft at the time of booking, though late changes to the aircraft type on the day of a flight are always a possibility.

          Et, heureusement, il y a des journalistes courageux et honnêtes pour les informer.

          « What no one knows yet is what the consumer’s reaction is going to be to the MAX (returning), said Arvai, who noted that passengers can now be much more informed than they were in the past. »

          Voici le résultat d’un sondage non-scientifique réalisé par Simple Flying auprès 2780 répondant au mois de juillet :
          55% des répondants se sont dit prêts et 45% des répondants veulent attendre.
          De ces 45%, 42% attendraient 6 mois et 58% attendraient un an.

          https://simpleflying.com/boeing-737-max-return-2/

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          • Nicolas

            Le voyageur lambda (99%) ne consulte pas les sites comme Simple Flying et LADQ…. Le sondage ci-haut concerne le 1% restant et tout de même plus de la moitié sont déjà prêt et le MAX n’est même pas encore de retour, ce pourcentage sera beaucoup plus haut lorsque la FAA, les associations de pilotes et les transporteurs déclareront que l’appareil est sécuritaire

          • André Allard

            C’est vrai que le voyageur lambda ne consulte pas les sites spécialisés, mais il lit les nouvelle sur les réseaux sociaux ou dans les médias traditionnels. Je regarde juste comment Boeing a été couvert depuis un an je peux te dire que le voyageur lambda sera au courant du retour du MAX. Je peux même t’affirmer qu’il sera informer à chaque fois qu’une peccadille va survenir. Bonne chance Boeing! 😉

          • Nicolas

            Mais ça ne durera que quelques jours voire quelques semaines pour les plus têtus, si on était proche, je te demanderais de questionner ma femme sur le MAX pour que tu comprennes c’est quoi un voyageur lambda, tu comprendrais vite qu’elle ne ferait pas la différence entre un 737 et 777, encore moins entre un 737 MAX et 737NG ou un A320….

      • CLAUDE BOULAY

        Je me demande bien pourquoi Westjet consacre autant de temps et d’argent s’il y a 99 % des passagers qui ne savent pas sur quel avion il voyage. il y a plusieurs autres cies qui font la même chose.
        WestJet prêt à faire face aux sensibilités autour du MAX.
        « Nous anticipons les sensibilités. Nous serons totalement transparents tous ceux qui vont monter à bord d’un avion MAX, ils le savent, et nous serons prêts à traiter avec les gens si, pour une raison quelconque, ils ne se sentent pas à l’aise.

        Martin n’a pas précisé précisé comment WestJet avait l’intention de traiter les objections au vol du type. Cependant, d’autres compagnies aériennes ont également dit qu’elles souhaitent être transparentes avec les clients sur le type. Retour en Mars, le PDG de Ryanair Michael O’Leary a déclaré Simple Flying qu’il ne forcerait pas les passagers à voler sur le MAX.

        https://simpleflying.com/westjet-wont-hide-the-boeing-737-max-from-customers/?utm_source=dlvr.it&utm_medium=twitter

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        • Nicolas

          C’est justement parce qu’ils seront très peu nombreux à se plaindre, et ils le savent, qu’ils se permettent d’offrir ce type de « compensation ». De plus, il y aura peu de MAX en service dans le monde donc ce sera assez facile de relocaliser les clients dans un autre appareil mais dans 2 ou 3 ans ce sera très différent, particulièrement chez Westjet, Air Canada et Ryanair (et des dizaines d’autres transporteurs).

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  • louis martineau

    Certains employés américains de Boeing qui s’expriment sur des sites depuis quelques années mentionnent que la culture de Mcdonnel Douglas qui prévalait chez cette avionneur au moment de la fusion à contaminer de manière négative la façon de faire chez Boeing. Ce qui aurait mener aux dérives en ce qui concerne le développement sécuritaire de certains appareils entres autres problèmes dont les relations de travails avec ces salarié.es. ….http://simpleflying.com/mcdonnel-douglas-boeing-merger/

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  • MarcelC.

    Il y a exactement un an, en septembre 2019, l’EASA émettait une Déclaration de clarification sur la certification du MAX.
    https://www.easa.europa.eu/newsroom-and-events/press-releases/statement-clarification

    En voici un extrait :
    « Consequences of failures of systems affecting potentially the aircraft stability need to be assessed using acceptable safety analysis methodology also subject to airworthiness requirements. Pilot training requirements are not meant to compensate for non-acceptable design on the compliance and safety standpoint. »

    Il sera intéressant de voir comment l’EASA mettra en œuvre le contenu de la dernière phrase. Selon eux, la formation des pilotes ne visent pas à compenser une conception défaillante. Or, nous savons que cet avion connaît son lot de problèmes structurels, notamment au niveau des capteurs, des logiciels, du pilote automatique, du vérin du compensateur, sans compter sa propension naturelle au décrochage. À mon humble avis, si l’EASA reste fidèle à son approche, il sera difficile, voir impossible pour eux de recertifier le MAX sans recommander d’importantes modifications structurelles.

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